Clinique Saint-Jean l’Ermitage - SANTÉ PÔLE MELUN
RETOUR DE CONGRÈS IFATS 2019
LE TISSU GRAS ET LA STOMATOLOGIE MAXILLO-FACIALE
IFATS = International Federation for Adipose Therapeutics and Science (Fédération Internationale des thérapies et Sciences du tissu Adipocytaire)
En quoi le tissu adipocytaire (la graisse) peut-il intéresser la stomatologie chirurgie orale et maxillo-faciale ?
- Pour faire des greffes de lobules de gras afin de combler des défauts volumétriques de la face d’origines congénitale, traumatique ou après certaines maladies.
- Pour en tirer les cellules souches dites « adipocytaires » qui ont un énorme potentiel de réparation avec un important degré de sécurité par rapport à d’autres cellules souches parce que moins primitives et plus différenciées.
- Parce que la graisse est souvent abondante et facile à prélever avec un minimum de traumatisme.
Que fait-on avec le tissu adipeux ? Qu’y a-t-il dedans d’utile ?
- Des greffes de lobules en prenant soin de collecter ces lobules en préservant leur architecture. On s’en sert essentiellement pour combler les déficits en volume.
- La fraction vasculaire stromale (SVF = Stromal Vascular Fraction) est ce qui reste après avoir retiré le « gras ». Cette petite fraction contient de nombreuses cellules aux propriétés régénératrices très importantes dont les cellules souches adipocytaires. On s’en sert pour corriger des défauts de cicatrisation cutanés ou osseux, pour traiter des lésions d’organes touchés par la radiothérapie, pour faire des matrices pour combler des défauts osseux, pour protéger des vaisseaux, nerfs ou tendons au cours d’une chirurgie difficile.
- Les cellules souches adipocytaires. Elles sont difficiles à extirper car elles sont très petites et se cachent dans le réseau fibreux et vasculaire qui circule entre les lobules graisseux. Il faut aujourd’hui utiliser une « digestion enzymatique » pour en avoir une suspension pure et prête à être utilisée. Du coup, ces cellules peuvent être utilisées pour relever des défis beaucoup plus importants : Ischémie aiguë des membres, cardio, néphrologie, arthrose genoux et autres, moelle épinière lésée par accident, séquelles de radiothérapie, greffes sur mesure en ensemençant des matrices de support imprimées en 3D.
- Les vésicules extra-cellulaires. (ESV = Extracellular vesicles). Découvertes fortuitement mais bien caractérisées par des équipes françaises il y a quelques années, ces vésicules sont sécrétées par les plaquettes, les cellules « blanches » et les cellules souches dont celles que l’on trouve dans la graisse. Elles contiennent d’importantes quantités de « messagers » que l’on appelle cytokines, facteurs de transcription, et RNA messager. Leur potentiel est énorme car elles sont faciles à utiliser comme transporteur (de médicament ou de message pour stimuler une cellule). On leur prête même un rôle dans le contrôle de la croissance des tumeurs à leur début.
IFATS, cette société savante a une dizaine d’années et a été fondée par des européens et américains. Le programme de ce congrès de 4 jours était très alléchant avec des « grosses pointures » dans de nombreuses spécialités, de la science fondamentale, de la pratique et 35 exposants industriels.
Le programme : Plus de 160 présentations plénières, abstracts et vidéos.
- Programme largement dominé par la chirurgie plastique (liftings, reconstruction mammaire, liposuccions, lipoplasties)
- Beaucoup de communications sur la cicatrisation des plaies chroniques, ulcères, cicatrices
- Plus de 25 communications « sciences fondamentales » sur la biologie du tissu adipeux et des produits que l’on en extrait
- Déjà 8 communications sur les vésicules extracellulaires.
- 6 communications sur l’impression 3D de greffes d’organes ensemencés par cellules souches
- Une dizaine de communications concernant les maladies d’articulations et comment traiter l’arthrose et autres affections rhumatologiques.
- Cardio-vasculaire : cardiomyopathies, péricardites et ischémie aiguë des membres
- Dermatologie : séquelles de radiothérapie, cicatrices chéloïdes, sclérodermie, dermatite herpétique, traitement de l’alopécie.
- Digestif : Fistules dues à la maladie de Crohn, séquelles de radiothérapie
- Uro-gynéco : incontinences, néphropathies, lymphœdème après chirurgie du cancer du sein
- Neurologie : lésions de la moelle épinière, Parkinson, douleurs neuropathiques (canal carpien et douleurs cutanées post zona)
- Crânio-facial et maxillo : en dehors des liftings et autres actes de chirurgie plastique, on a vu peu de communications. Correction des défauts de croissance crâniens du jeune enfant, traitement de maladies des cordes vocales et des nécroses osseuses des mâchoires dues à des médicaments pour l’ostéoporose.
- De façon plutôt inhabituelle, beaucoup d’exposants ont communiqué en séance sur la qualité de leurs produits. Habituellement dans les congrès de sociétés savantes, ces communications sont en satellite aux heures de pause ou sous forme d’ateliers.
Globalement, la qualité de ce congrès a été très bonne. On peut dire, sans chauvinisme, que les équipes françaises ont particulièrement brillé par la qualité et surtout le sérieux scientifique de leurs présentations. Beaucoup d’équipes des autres pays européens ont aussi présenté des travaux d’excellente qualité. Certaines communications (plutôt américaines) étaient de qualité insuffisante, sans aucun support scientifique, à la limite de l’éthique médicale et pour certaines d’entre-elles inacceptables dans le cadre d’un congrès scientifique. Ceci n’est malheureusement que le reflet de l’absence de régulation claire aux Etats-Unis où fleurissent de nombreux centres médicaux qui proposent des traitements par cellules souches en abusant de la détresse des patients et souvent pour des sommes faramineuses. Ceci est aussi le témoin d’une science jeune qui se cherche encore. Celle des cellules souches et du tissu adipocytaire portée par l’IFATS une société savante qui cherche sa maturité.
Le traitement de nombreuses maladies et affections par cellules souches (en particulier du tissu graisseux) porte tellement d’espoir et d’avenir que certains praticiens se « lancent » sans justification ou argumentaire suffisant dans des traitements à la limite de l’éthique. Les praticiens responsables doivent s’investir dans cette discipline avec sérieux et contribuer par l’observation et les études cliniques à améliorer le savoir commun.
L’institut de Recherche Médicale de la clinique Saint-Jean est engagé dans cette démarche et aide les praticiens à organiser ces études.